Rancoeur lasse

Malgré sa folle trahison

N’est-elle pas encor la même ?

La fierté n’est plus de saison.

Je l’aime.
Je sais qu’elle reste, malgré

D’impurs contacts, vierge éternelle,

Qu’aucun venin n’a pénétré

En elle,
Marbre trop charnel qui subit

Toutes souillures, mais les brave ;

Puisque la pluie, en une nuit,

Le lave.
Même au temps des premiers regards,

Je la savais vaine et perverse.

Mais l’âme aux menaçants hasards

Se berce.
Fermant les yeux, je me livrais

A sa suavité malsaine,

Pensant bien que j’en porterais

La peine.
Mordu, mourant, d’avoir serré

Sur ma poitrine la panthère,

J’en veux rester fier, et saurai

Me taire.
Ce mois d’avril, je veux bannir

De mon coeur les rêves moroses.

Je veux orner son souvenir

De roses.
Et je reprends la liberté

D’adorer sa grâce suprême.

Tel que j’étais je suis resté.

Je l’aime.

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Rancoeur lasse
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