Bizoy quen ne consquaff a maru garu ne marnaff.

Jamais je ne dors que je ne meurs de mort amère.
Ancien proverbe breton.
Les goules de l’abyme,

Attendant leur victime,

Ont faim :

Leur ongle ardent s’allonge,

Leur dent en espoir ronge

Ton sein.
Avec ses nerfs rompus, une main écorchée,

Qui marche sans le corps dont elle est arrachée,

Crispe ses doigts crochus armés d’ongles de fer

Pour me saisir ; des feux pareils aux feux d’enfer

Se croisent devant moi ; dans l’ombre, des yeux fauves

Rayonnent ; des vautours, à cous rouges et chauves,

Battent mon front de l’aile en poussant des cris sourds ;

En vain pour me sauver je lève mes pieds lourds,

Des flots de plomb fondu subitement les baignent,

À des pointes d’acier ils se heurtent et saignent,

Meurtris et disloqués ; et mon dos cependant,

Ruisselant de sueur, frissonne au souffle ardent

De naseaux enflammés, de gueules haletantes :

Les voilà, les voilà ! dans mes chairs palpitantes

Je sens des becs d’oiseaux avides se plonger,

Fouiller profondément, jusqu’aux os me ronger,
Et puis des dents de loups et de serpents qui mordent

Comme une scie aiguë, et des pinces qui tordent ;

Ensuite le sol manque à mes pas chancelants :

Un gouffre me reçoit ; sur des rochers brûlants,

Sur des pics anguleux que la lune reflète,

Tremblant, je roule, roule, et j’arrive squelette.

Dans un marais de sang ; bientôt, spectres hideux,

Des morts au teint bleuâtre en sortent deux à deux,

Et, se penchant vers moi, m’apprennent les mystères

Que le trépas révèle aux pâles feudataires

De son empire ; alors, étrange enchantement,

Ce qui fut moi s’envole, et passe lentement

À travers un brouillard couvrant les flèches grêles

D’une église gothique aux moresques dentelles.

Déchirant une proie enlevée au tombeau,

En me voyant venir, tout joyeux, un corbeau

Croasse, et, s’envolant aux steppes de l’Ukraine,

Par un pouvoir magique à sa suite m’entraîne,

Et j’aperçois bientôt, non loin d’un vieux manoir,

À l’angle d’un taillis, surgir un gibet noir

Soutenant un pendu ; d’effroyables sorcières

Dansent autour, et moi, de fureurs carnassières

Agité, je ressens un immense désir

De broyer sous mes dents sa chair, et de saisir,

Avec quelque lambeau de sa peau bleue et verte,

Son cœur demi-pourri dans sa poitrine ouverte.

Évaluations et critiques :

Cauchemar
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