À Sainte-Beuve

À la porte d’un beau château

Bâti pendant la Renaissance,

Une dame au riche manteau,

Les cheveux baignés d’une essence

Divine, rit au vert coteau.
Elle a l’œil superbe et moqueur ;

Ses sourcils noirs aux courbes jointes

Enivrent comme une liqueur,

Et des rayons baisent les pointes

Folâtres de sa bouche en cœur.
Elle montre l’un de ses seins

Nu. Plus souple qu’une liane,

Cette Nymphe, heureuse aux larcins,

A pris les armes de Diane

Qui lui servent pour ses desseins.
Son arc est d’un bois lisse et dur,

Et ses flèches bien aiguisées,

Cachant leurs pointes d’acier pur

Sous la dorure déguisées,

Sonnent dans le carquois d’azur.
Quand sa tresse inonde son cou,

(Bien que cette amante farouche

Vous plante là pour un bijou,)

Pour les morsures de sa bouche

On se résigne à mourir fou.
Cette chasseresse d’Amours

Dont il faut, même au prix d’un crime,

Idolâtrer les fiers atours

Et les belles mains, c’est la Rime,

Délice et tourment de nos jours.
Quel bonheur, d’orner ses appas

De joyaux ! Au bois qu’avril dore,

Quel bonheur de baiser ses pas !

Quand on l’a connue, on l’adore

Pour jamais, et jusqu’au trépas.
Oh ! pour moi, rien n’éclipsera

Sa lèvre indignée et rieuse !

Sa voix seule me bercera

Et mon sang tout entier sera

Bu par cette victorieuse.
Car, s’il faut la fuir, quel tourment !

Loin de son regard comme on jeûne !

Ce que vaut ce clair diamant

Tu le sais bien, toi qui, tout jeune,

As été son plus cher amant !
Mai 1855.

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À Sainte-Beuve
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