Métempsycose

A Georges Lorin.

Longtemps après que toute vie

Sur la terre veuve aura cessé,

Les tristes ombres des humains,

Les âmes plaintives des humains,

Reviendront visiter

La terre veuve

Où toute vie aura cessé.

Elles quitteront les corps nouveaux

Que la tyrannique droite de Dieu

Aura assigné à leur destinée pérégrine,

Dans quelque planète lointaine,

Et pieusement viendront visiter

La terre veuve.

Allors, leur prunelle spirituelle

Et leur immatérielle oreille

Reconnaîtront les formes, les couleurs et les sons

Qui furent les oeuvres de leurs mains assidues,

Durant les âges amoncelés et oubliés,

Qui furent les oeuvres de leurs mains débiles,

De leurs mains plus fortes pourtant

Que le Néant.

Tandis que palpitait en eux la terrestre vie

Et que leur bouche proclamait

Le nom trois fois saint de l’Art immortel.

Et quand, au matin revenu, un autre soleil

Les rappellera vers les corps assignés

A leur destinée pérégrine,

Dans quelque planète lointaine,

Chaque ombre errante, chaque âme plaintive

Dira: – j’ai fait un rêve prodigieux.

Et, sous le fouet de l’éternelle Beauté

Et de l’éternelle Mélancolie,

Les humains à nouveau dompteront -

Dans cette planète lointaine -

Les couleurs, les formes et les sons.

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Métempsycose
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