06 – Le Baiser d’Ervare

Soudain c’est un cri,

Et des voix et voici :

Slafide, surgi du bois, a saisi

Lodrune, à pleins bras, dans un frisson de plumes!

Égile courbe l’Oline et sa grâce

Et lui prend un baiser, face à face…

La surprise diverse,

Puis des cris et un rire,

Et le baiser encore

Aux lèvres qui se cherchent;
Wieland est debout ; il hésite, fébrile,

Troublé d’une ivresse, las d’une joie amère,

Triste et gai à la fois

Et penché sur son rêve profond

Comme l’aurore et la mer ;

11 regarde et s’attarde ;

Il hésite ;
Mais Égile:

(C’est un rire double qu’un long baiser confond)

« Prends donc celui-ci, fille blanche!

Vois, l’Alvitte!

Il a peur de sa joie,

Ce n’est pas un chasseur; il a peur!

C’est une proie, c’est ta proie!

Saisis-le et fais vite! »
Et Slafide

(Il retient son butin,

Rose de rire aux baisers qui la criblent.

Il tient Lodrune à pleines mains) :

« Wieland, crie-t-il, ton étreinte est terrible ;

Qu’as-tu fait de ta force?

N’étreins-tu que les ours? »
Wieland rit ; il hésite :

Alors, Ervare l’Alvitte

Met ses bras au cou blanc de Wieland,

Chair si blanche qu’on eût dit une fille,

Elle le brûle à la bouche

De ses lèvres, et l’étouffe

D’un long baiser.

Aspirant son souffle

Jusqu’à s’en griser…
De ses bras à son cou,

Elle a fait un anneau de sa chair qu’elle noue :

Depuis les petits doigts tressés, les mains,

Jusqu’au coude arrondi qui le presse,

Et d’épaule en épaule ;

Anneau tiède et léger qui le brûle et lui pèse ;

Et la tête fine et la gorge de neige

Et les yeux sur ses yeux abaissés

Et la bouche sur la sienne sans parole qu’un baiser

Et la claire résille de ses cheveux tombés

Que  la brise rejette

L’enlace en ses anneaux de feu…

La forme de son rêve est vivante et l’étreint!

Et le manteau des peines est léger autour d’eux,

Comme le plumage des cygnes

Et la senteur des pins.
La force de Wieland aux mains fortes,

Enveloppe la fille et l’emporte :

Comme un fardeau de fleurs soulevé

Vers la lèvre enivrée

Fait crier tout le sang

Et voile le regard,

Ainsi la saveur est si douce en sa bouche

Qu’il en tremble,

Le fardeau, si léger qu’il faiblit au départ.
Et ils vécurent ensemble;

Du baiser de l’Alvitte Wieland conçut un art.

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