Première Moisson

Ce site, c’est Québec. Au nord moment splendides

Les échelons lointains des vastes Laurentides.

En bas, le fleuve immense et paisible, roulant

Au soleil du matin son flot superbe et lent,

Reflète, avec les pins des grands rochers moroses,

Le clair azur du ciel et ses nuages roses.

Nous sommes en septembre ; et le blond fructidor.

Qui sur la plaine verte a mis des teintes d’or,

Au front des bois bercés par les brises flottantes

Répand comme un fouillis de couleurs éclatantes ;

On dirait les joyaux d’un gigantesque écrin.
Un repos solennel plein de calme serein

Plane encor sur ces bords où la chaste Nature,

Aux seuls baisers du ciel dénouant sa ceinture,

Drapée en sa sauvage et rustique beauté,

Garde encor les trésors de sa virginité.
Cependant un lambeau de brise nous apporte

Comme un refrain joyeux qu’une voix mâle et forte,

Mêlée à des éclats de babil argentin,

Jette dans l’air sonore aux échos du lointain.

Ce sont des moissonneurs avec des moissonneuses.

Ils suivent du sentier les courbes sablonneuses,

Et, le sac à l’épaule, ils cheminent gaîment.

Ce sont des émigrés du doux pays normand,

Des filles du Poitou, de beaux gars de Bretagne,

Qui viennent de quitter leur lande ou leur campagne

Pour fonder une France au milieu du désert.
L’homme qui les conduit, c’est le robuste Hébert,

Un vaillant ! le premier de cette forte race

Dont tout un continent garde aujourd’hui la trace,
Qui, dans ce sol nouveau par son bras assaini,

Mit le grain de froment, trésor du ciel béni,

Héritage sans prix dont la France féconde

Dans sa maternité dota le nouveau monde.

Ils vont dans la vallée où les vents assoupis

Font ondoyer à peine un flot mouvant d’épis

Qu’ont mûris de l’été les tépides haleines.
Bientôt le blé jauni tombe à faucilles pleines ;

La javelle, où bruit un essaim de grillons,

S’entasse en rangs pressés au revers des sillons,

Dont le creux disparaît sous l’épaisse jonchée ;

Chaque travailleur s’ouvre une large tranchée ;

Et, sous l’effort commun, le sol transfiguré

Laisse tomber les plis de son manteau doré.
Le soir arrive enfin, mais les gerbes sont prêtes :

On en charge à pleins bords les rustiques charrettes

Dont l’essieu va ployant sous le noble fardeau ;

Puis, presque recueilli, le front ruisselant d’eau,
Pendant que, stupéfait, l’enfant de la savane

Regarde défiler l’étrange caravane,

Et s’étonne à l’aspect de ces apprêts nouveaux,

Hébert, qui suit, ému, le pas de ses chevaux,

Rentre, offrant à Celui qui donne l’abondance

La première moisson de la Nouvelle-France !

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Première Moisson
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