Béranger (2)

Il dort sous des ombrages verts,

Quand la liberté le rappelle :

Il dort, le poëte, infidèle

À ces captifs qui, dans les fers,

Attendaient l’aumône d’un vers,

Et pas de lyres qui les plaignent,

Pas un Blondel pour soulager

Tous ces Cœurs-de-Lyon qui saignent !…

Ah Dieu ! si j’étais Béranger !
Au Luxembourg, mon vers vengeur

Irait frappant de stalle en stalle,

Et sa chiquenaude brutale

Au front d’airain du vieux jugeur

Ferait connaître la rougeur.

Je saurais dégoûter, j’espère,

Et Perrin-Dandin de juger,

Et Petit-Jean d’être compère…

Ah Dieu ! si j’étais Béranger !
Je consolerais les Amours :

De la beauté j’ai vu les larmes

Couler sur des gants de gendarmes,

Et sa plainte tomber toujours

Sur des cœurs et des barreaux sourds.

Triste, en rêvant au long martyre

Qu’on lui défend de partager,

Lisette a perdu son sourire…

Ah Dieu ! si j’étais Béranger !
L’avenir est si beau là-bas !…

À des chants d’espoir tout l’engage.

A-t-il remis sa montre en gage,

Le poëte ? et ne sait-il pas

Combien le temps a fait de pas ?

Pour montrer du doigt sur la rive,

Au siècle qui va naufrager,

Les fleurs dont le parfum m’arrive,

Ah Dieu ! si j’étais Béranger !
Lui-même a vingt fois en chantant

Bravé les bêtes du prétoire ;

De dormir avant la victoire,

Après avoir guerroyé tant,

Il a droit, sans doute, et pourtant…

Il faut, viennent les représailles,

Vienne un Juillet ou l’étranger,

Un Tyrtée aux champs de batailles !…

Ah Dieu ! si j’étais Béranger !
1835.

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Béranger (2)
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