Surgite mortui

Couplets chantés à un déjeuner dont tous

les convives avaient tenté ou médité le suicide.
Vous, qui mourez à tout propos

Et six fois par semaine,

Ça reprenez haleine :

Le dimanche est jour de repos.

Sortis de terre

Par un mystère,

Morts, buvons frais : le suicide altère ;

Déjeunons encor, puis mourons…

Mourons de rire, ou bien courons

Nous pendre ailleurs… à des bras blancs et ronds.

Surgite, pour me suivre,

Mortui, qu’on s’enivre ;

Le verre en main, essayons de revivre !
Bien qu’aux mansardes logés tous,

L’Espérance nous reste ;

Habitante céleste,

De plain pied elle entre chez nous,

Sous la tutelle

De l’immortelle

Marchons unis : Encore un jour, dit-elle ;

Demain les roses fleuriront,

Demain les vignes mûriront,

Demain vos Christs du tombeau sortiront,

Surgite, pour me suivre,

Mortui, qu’on s’enivre ;

Le verre en main, essayons de revivre !
Roucoulant d’amour sur un toit,

Vrai cœur de tourterelle,

Quand tu mourais pour elle,

Ami, Claire vivait pour toi :

Magicienne,

Aérienne,

De sa fenêtre elle lorgnait la tienne,

Et par les fentes du volet,

Vers ton front sous le pistolet

De ses doigts blancs un baiser s’envolait.

Surgite, pour me suivre,

Mortui, qu’on s’enivre ;

Le verre en main, essayons de revivre !
Point de blasphèmes : autant vaut

Aboyer à la lune ;

La Gloire et la Fortune

On fait leurs nids d’aigle bien haut ;

Mais en campagne

Sur la montagne,

Jeunes chasseurs, si le sommeil vous gagne,

Qu’au voisin glacé par le vent

Un camarade bon vivant

Tende sa gourde et répète : En avant !

Surgite, pour me suivre,

Mortui, qu’on s’enivre ;

Le verre en main, essayons de revivre !
J’ai quelque droit, vous le sentez,

De prêcher sur ce thème :

J’en suis au quatrième

De mes suicides tentés.

En vain je blâme

Ce siècle infâme ;

En vain cent fois j’ai dit : Partez, mon âme !

Que Dieu seul la pousse dehors ;

Rose y tient : je garde mon corps ;

Ses jolis yeux font revenir les morts.

Surgite, pour me suivre,

Mortui, qu’on s’enivre ;

Le verre en main, essayons de revivre !
Suicide, monstre odieux,

Devant notre eau bénite

Rentre aux enfers bien vite…

Mais il vient et sur nous, grands dieux !

Frelon morose,

Il se repose :

Pour le chasser prenons le schall de Rose.

Les enfants nés dans ce repas

D’une rasade et d’un faux pas

Vivront cent ans, et ne se tueront pas !

Surgite, pour me suivre,

Mortui, qu’on s’enivre ;

Le verre en main, essayons de revivre !

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Surgite mortui
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