A Charles Desfossez

Puisqu’il faut songer au trépas

Quand on a fini sa ballade,

Docteur, ne me guérissez pas:

Depuis trente ans, je suis malade!
J’ai le mal divin et mortel

D’aimer toutes les belles choses,

Et de frémir comme à l’autel

Devant la majesté des roses.
J’ai le mal de croire au ciel bleu

Où, quand ma raison perd ses voiles,

Je vois distinctement un Dieu

Mener les chariots d’étoiles.
Dans mon délire je revois

Ces longs fleuves bordés de vignes

Où les flots à la douce voix

Charmaient les lauriers et les cygnes,
Et je cherche l’horizon pur

Où, dans leurs graves symétries,

Blanchissaient, éclairant l’azur,

Les temples et les théories.
Ne me guérissez pas, docteur,

Pour qu’ensuite je me promène,

Insoucieux et triste acteur,

Au milieu de la farce humaine.
Si jamais, sous un vil manteau,

Histrion des frivoles haines,

Je me mêlais sur un tréteau

Aux diseurs de paroles vaines,
Si je devenais comme eux tous

Un bouffon que la Muse évite,

Accourez alors, hâtez-vous,

Cher docteur, guérissez-moi vite!
Juin 1867.

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A Charles Desfossez
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