Récits épiques – Blasphème et Prière

Quand le déluge eut fait son œuvre salutaire,

La race de Noé pullula sur la terre

Ainsi que les yeux d’or sur les plumes du paon.

Alors dans les vallons fertiles du Liban

Heth et Sidon, issus de Cham, le fils indigne,

Vinrent, pour cultiver le froment et la vigne,

Et furent de puissants chefs devant Jéhovah.

Sidon eut de nombreux enfants qu’il éleva ;

Heth devint veuf, après un an de mariage,

Et n’obtint qu’un seul fils, l’espoir de son vieil âge.

Hais, étant en sueur, le soir d’une moisson,

Ce fils but de l’eau froide et fut pris d’un frisson,

Puis mourut ; et depuis ce temps, le triste père,

Contre Dieu qui l’accable et qui le désespère,

Se révolte, et souvent même il a blasphémé.
Au contraire, Sidon, de tous les siens aimé,

Est heureux, opulent, sage, pur de tous vices ;

Il prie, il jeûne, il offre au ciel des sacrifices ;

Et tous ses serviteurs vantent sa piété.
Un jour que tous les deux, par la chaleur d’été,

Sur leurs terres venaient de se mettre à l’ouvrage,

Un nuage effrayant où grondait un orage

Accourut, et le ciel brusquement fut tout noir.
Heth, que rongeait toujours son ancien désespoir,

Levant le poing, cria :

« Frappe, Dieu méchant, frappe !

Et qu’il ne reste plus à mes ceps une grappe !

Je te brave. Peux-tu me faire mal, après

Que tu m’as dérobé le fils que j’adorais ?

Va ! Que ta foudre éclate et que ta grêle tombe,

Dieu cruel, qui couchas mon enfant dans la tombe !

Commets cette injustice encore, Dieu trompeur !

Je resterai debout. Tu ne me fais pas peur ! »
Le nuage passa ; car Jéhovah lui-même,

En voyant la douleur, eut pitié du blasphème ;

Et l’orage plana sur le champ de Sidon.
Celui-ci, se jetant à genoux, dit :

« Pardon. Dieu d’équité, pardon ! Épargne ma récolte !

Jamais je ne me plains ni je ne me révolte ;

Toujours, devant ta face auguste, j’ai tremblé ;

Et tu protégeras mon raisin et mon blé.

Depuis le temps déjà lointain où j’étais jeune,

Je dis fidèlement ma prière et je jeûne ;

Tu dois m’en savoir gré. Souvent sur ton autel,

Seigneur, Dieu Tout-Puissant, l’Unique et l’Immortel,

Ma main a répandu le sang de mes génisses.

Je n’ai point fait de mal, pour que tu me punisses.

Ne me laisse donc pas te supplier en vain,

Roi du ciel, et défends ma farine et mon vin ! »
Mais comme la prière, au Seigneur adressée,

Déplaît quand elle part d’une âme intéressée,

Contre l’avare en pleurs l’Éternel s’irrita,

Et ce fut sur Sidon que l’orage éclata.

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