Les Taches jaunes

Seul, le coude dans la plume,

J’ai froissé jusqu’au matin

Les feuillets d’un gros volume

Plein de grec et de latin ;
Car nulle étroite pantoufle

Ne traîne au pied de mon lit,

Et mon chevet n’a qu’un souffle

Sous ma lampe qui pâlit.
Cependant des meurtrissures

Marbrent mon corps, que n’a pas

Tatoué de ses morsures

Un vampire aux blancs appas.
S’il faut croire un conte sombre,

Les morts aimés autrefois

Nous marquent ainsi, dans l’ombre,

Du sceau de leurs baisers froids.
À leurs places, dans nos couches,

Ils s’allongent sous les draps,

Et signent avec leurs bouches

Leur visite sur nos bras.
Seule, une de mes aimées,

Dans son lit noirâtre et frais,

Dort les paupières fermées

Pour ne les rouvrir jamais.
— Soulevant de ta main frêle

Le couvercle du cercueil,

Est-ce toi, dis ! pauvre belle,

Qui, la nuit, franchis mon seuil,
Toi qui, par un soir de fête,

À la fin d’un carnaval,

Laissas choir, pâle et muette,

Ton masque et tes fleurs de bal ?
Ô mon amour la plus tendre,

De ce ciel où je te crois,

Reviendrais-tu pour me rendre

Les baisers que tu me dois ?
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Les Taches jaunes
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