Ma France, quand on a nourri son cœur latin

Du lait de votre Gaule,

Quand on a pris sa vie en vous comme le thym

La fougère et le saule,
Quand on a bien aimé vos forêts et vos eaux,

L’odeur de vos feuillages,

La couleur de vos jours, le chant de vos oiseaux,

Dès l’aube de son âge.
Quand amoureux du goût de vos bonnes saisons

Chaudes comme la laine,

On a fixé son âme et bâti sa maison

Au bord de votre Seine,
Quand on n’a jamais vu se lever le soleil

Ni la lune renaître

Ailleurs que sur vos champs, que sur vos blés vermeils,

Vos chênes et vos hêtres,
Quand jaloux de goûter le vin de vos pressoirs,

Vos fruits et vos châtaignes,

On a bien médité dans la paix de vos soirs

Les livres de Montaigne,
Quand pendant vos étés luisants, où les lézards

Sont verts comme des fèves.

On a senti fleurir les chansons de Ronsard

Au jardin de son rêve,
Quand on a respiré les automnes sereins

Où coulent vos résines,

Quand on a senti vivre et pleurer dans son sein

Le cœur de Jean Racine,
Quand votre nom, miroir de toute vérité,

Émeut comme un visage,

Alors on a conclu avec votre beauté

Un si fort mariage
Que l’on ne sait plus bien, quand l’azur de votre œil

Sur le monde flamboie,

Si c’est dans sa tendresse ou bien dans son orgueil

Qu’on a le plus de joie…

Évaluations et critiques :

Le Pays
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