La Fille de l’air

À Herminie.
Je suis blonde et charmante,

Ailée et transparente,

Sylphe, follet léger, je suis fille de l’air,

Que puis-je avoir à craindre ?

Une nuit de m’éteindre ?

Qu’importe de mourir comme meurt un éclair !
Je vole sur la nue ;

Aux mortels inconnue,

Je dispute en riant la vitesse aux zéphirs !

Il n’est point de tempête

Qui pende sur ma tête ;

Je plane, et n’entends plus des trop lointains soupirs.
Je vais où va l’aurore ;

On me retrouve encore

Aux mers où tout en feu se plonge le soleil !

Quand son tour le ramène,

Prompte, sans perdre haleine,

je le joins, et c’est moi qu’on salue au réveil.
Qui suis-je ? où suis-je ? où vais-je ?

N’ayant pour tout cortège

Que les oiseaux de l’air, les étoiles aux cieux ?

Je ne sais ; mais tranquille,

Aux pensers indocile,

Je m’envole au zénith, au fronton radieux !
Parfois je suis contrainte ;

Mais c’est la molle étreinte

De l’amour qui me berce en ses vives ardeurs !

J’en connais tous les charmes ;

J’en ignore les larmes,

Et toujours en riant, je vais de fleurs en fleurs
Vive, alerte et folâtre

De l’air pur idolâtre

Je vole avec Iris aux couleurs sans pareil ;

Souvent je me dérobe

Dans les plis de sa robe

Faite d’un clair tissu des rayons du soleil.
Souvent dans mon courage,

Je rencontre au passage

Une âme qui s’envole au céleste séjour ;

Je ne puis, bonne et tendre,

Lorsqu’elle peut m’entendre,

Ne pas lui souhaiter vers moi le gai retour !
Des échos la tristesse

M’apprend que l’allégresse

Ne règne pas toujours aux choses d’ici-bas,

Et que parfois la guerre

Va remuer la terre.

La faim, le froid, la soif ! qu’on ne m’en parle pas !
Si jadis quelque chose

Me venait ; de la rose

C’était le doux parfum que le vent m’apportait !

Je croyais, pauvre folle,

La rose, le symbole

Du bonheur que la terre à mes yeux présentait !
La terre par l’espace

Dans l’ordre qu’elle trace

Traîne trop de malheurs et de peine en son vol ;

Le bruit souvent l’atteste,

Son spectacle est funeste,

Et certes ne vaut pas un détour de mon col !
Pourquoi m’occuper d’elle,

Je suis jeune, et suis belle ;

Mes lèvres sont de rose, et mes yeux sont d’azur :

A mes traits si limpides

L’honneur mettrait des rides ;

La terre ternirait l’éclat de mon ciel pur !
Parfois vive et folette,

Poursuivant la comète,

Dans l’espace inconnu nous prenons notre essor !

A mon front je mesure

Sa blonde chevelure

Qui traîne dans les airs un ardent sillon d’or !
Lorsque je me promène,

Pour qu’elle m’entretienne,

Pourquoi pas de compagne aux mots doux et vermeils ?

Quoi ! n’en aurais-je aucune ?

Ah ! pardon, j’ai la lune,

L’étoile, la planète, et mes mille soleils !
J’ai quelquefois des anges,

Car leurs saintes phalanges,

Je les suis en priant ; plus prompte que l’éclair ;

Sans leur porter envie,

Je préfère ma vie :

Rien n’est si doux aux sens que de nager dans l’air.
Si le sommeil me gagne,

Ma couche m’accompagne,

Couverte d’un manteau brodé de bleus saphirs ;

Dans les flots de lumière,

Je ferme ma paupière,

Laissant flotter ma robe entrouverte aux zéphirs.

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