Manque d’illusions

I
Muse, rappelle-toi l’enfant aux genoux maigres

que nous vîmes, gonflés de rancune et d’amour,

prendre nonchalamment le chemin du retour

sous mille arbres blessés de ses rires allègres ;
sans trop y réfléchir aux gloires de ce corps

le souvenir ajoute une Raison sereine

- et pourtant nous l’avions reconnue fort humaine

aussitôt qu’elle eût fait les gestes du remords…
Qu’en dire (si déjà nous retrouvons ces choses

d’un coeur bien plus égal qu’il n’apparaît souvent)

sinon que des bonheurs formés logiquement

nous attendent, sans doute, où tu me les proposes ?
II
Contre ma chambre nue une ville résonne

d’harmonieux travaux, de sauvages loisirs.

Elle veut m’arracher à mon meilleur plaisir.

- J’écoute s’efforcer ce monstre monotone.
J’écoute, dans le ciel plus épais qu’un rideau,

un oiseau discordant crier qu’on se réveille,

le jour industrieux monter comme une treille,

et sonner le feuillage où frappe un fleuve d’eau.
Muse, le coeur me fend au milieu de leur vie :

je crois à la beauté des travaux patients.

Si nous demeurons doux chez les hommes bruyants,

c’est de toi qu’ils riront, ma sainte Poésie.
- Ah ! quittons cette chambre et suis-moi, déguisée.

Si le deuil est ici la parure des dieux

ils te reconnaîtront à tes splendides yeux.

- Et si leur existence est toujours aussi gaie,
ton corps éblouissant comme un poignard, ton corps

par la danse terrible et le poème sombre,

quant tu dépouilleras les voiles et les ombres

leur montrera ta vie au milieu de leur mort.

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Manque d’illusions
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